Face aux déboires quotidiens des Malgaches liés à la déliquescence des infrastructures publiques, on peut faire un parallèle avec ce que l’on appelle la “dette technique” dans le domaine technologique.
Le concept de dette technique est souvent utilisé pour décrire les coûts futurs engendrés par des choix rapides ou non optimaux dans le développement de logiciels. Cependant, ce phénomène ne se limite pas aux projets numériques ; il se retrouve aussi dans la gestion des infrastructures urbaines ou des entreprises essentielles comme la JIRAMA.
En informatique, la dette technique se manifeste par des défauts dans le code, une architecture mal pensée, des fonctionnalités bâclées ou des maintenances et mises à jour sans cesse reportées. Bien que ces choix répondent à des impératifs à court terme, ils ont des conséquences sur le long terme : coûts de maintenance élevés, diminution des performances, voire obsolescence rapide du produit. Les entreprises qui négligent leur dette technique se retrouvent souvent freinées dans leur capacité à innover, à croître et à rester compétitives.
Le parallèle est évident quand on regarde l’état des infrastructures publiques à Madagascar. Lorsque l’État renonce à l’entretien préventif d’une route pour des raisons budgétaires, il ne fait que retarder et aggraver le problème. L’usure de la chaussée continue, transformant une simple réparation de surface en un chantier majeur et bien plus coûteux. Le coût de réparation des nids-de-poule est bien moindre que celui de la réfection complète d’une route dégradée, mais trop souvent, les décisions à court terme entraînent des choix qui augmentent la “dette technique” du pays.
Ce phénomène est encore plus frappant dans des infrastructures critiques comme le réseau électrique. La JIRAMA doit entretenir et moderniser constamment son réseau pour garantir une fourniture stable et sécurisée d’énergie. Lorsqu’elle repousse des investissements en maintenance ou en mise à niveau des infrastructures, elle accumule une dette technique. Ce report conduit à des délestages fréquents, voire à des incidents dangereux, comme des incendies, avec des coûts de réparation bien supérieurs aux investissements initiaux.
À l’échelle nationale, l’accumulation des dettes techniques dans divers secteurs ne se limite pas aux coûts financiers directs. Ces décisions ont aussi des répercussions importantes sur l’économie locale et nationale. L’état dégradé des routes ralentit le transport des personnes et des marchandises et augmente les coûts logistiques des entreprises. Les coupures de courant paralysent l’activité économique des villes, entraînent des pertes de production, et perturbent des services essentiels comme les hôpitaux, les transports en commun, ou les communications.
Une mauvaise gestion de la dette technique peut créer un cercle vicieux où tout est traité dans l’urgence, aggravant encore la situation.
La dette technique, qu’elle soit informatique ou liée aux infrastructures publiques, n’est pas une fatalité. Elle résulte souvent de choix à court terme pour répondre à des contraintes immédiates, mais une gestion intelligente permet de minimiser ses impacts à long terme.
En somme, qu’il s’agisse de logiciels ou de réseaux de transport et d’énergie, la dette technique est une réalité qui ne disparaît pas par simple ignorance. Au contraire, elle s’accumule et devient un fardeau de plus en plus lourd à porter. La clé est d’adopter une gestion prévoyante et proactive, qui valorise l’entretien et l’amélioration continue plutôt que de simplement réagir aux urgences.
En fait à la fin ça se transforme en jeu de la patate chaude : “cpasmoi, cpasmafote, c’est lui”
J’ai un ami directeur d’une société d’état et qui m’a avoué que sa perspective à son poste est d’une semaine car il n’est pas à l’abri d’une abrogation à chaque conseil de ministre. Vu sous cet angle, qu’est il en a à cirer de dettes technique, il va plutôt s’employer à rentabiliser son poste au plus vite.
Generalisez aux 250 000 fonctionnaires
Pour en revenir au sujet, il m’est arrivé sur quelques projets d’avoir des clients très (trop) chia*** : ils voulaient éliminer complètement cette dette technique.
Du coup lesdits projets n’ont jamais été mis en production alors que les budgets injectés étaient vraiment conséquents.
Agilité ? ITIL ? Dette technique ? La vérité se trouve certainement quelque part dans ce fatras 🙂
(fa inona daholo l’ty zany resahiny lery zany)
La tribune parle de la Jirama mais cette situation peut être généralisée dans quasiment toutes les sociétés d’État malgache, pour ne parler par exemple que d’Air Madagascar où faute d’avoir entretenu, rénover ou même remplacer ses dizaines d’appareil en temps et en heure, il se retrouve a n’en plus disposer et même à se mettre en faillite.
Sinon la Sirama est aussi un cas d’école sur le sujet.
Le ferroviaire aussi
Quand on se ballade dans le pays, on traverse un nombre conséquent de ponts. La plupart date de la colonisation. Sachant que les ouvrages d’art en béton ont une durée de vie de 50 à 100 ans. Il va falloir s’attendre très prochainement à pas mal d’effondrements et des ponts provisoires (permanents) en perspectives.
Oui la dette technique est énorme, la dette du savoir aussi énorme (la proportion de personnes ayant un niveau scolaire correct par rapport à la population nous ramène dans les moyennes africaines à la sortie la colonisation).
Pourtant l’espoir est permis, une seule et unique chose est à éradiquer. La prédation. J’invite tous les amoureux de ce magnifique pays à relire et voir la video youtube de présentation de l’essai L’énigme et le paradoxe, Économie politique de Madagascar de Mireille Razafindrakoto, François Roubaud, Jean-Michel Wachsberger.
Pourquoi se contenter d’une présentation ? Autant lire le bouquin directement en ligne ? 🙂
https://www.diapason.mg/lenigme-et-le-paradoxe/
Disons que l’exemple de la tarte à se partager que nous sert Mireille Razafindrakoto est éloquent. Mais oui, n’hésitez vraiment pas à lire ce bouquin !